Plan
Introduction générale
À la recherche du Living Lab
En 2014, dans un hôpital parisien :
- Bonjour Madame.
- Bonjour Monsieur, que puis-je pour vous ?
- Je cherche à me rendre au Living Lab. Pourriez-vous me dire où il se trouve exactement ?
- Le quoi ? Désolée, je n’ai pas compris ce que vous cherchez ?
- Le Living Lab…, heu…
- … Je ne connais pas.
- Le laboratoire vivant ?…c’est un endroit avec des usagers où on fait de la co-conception de technologies.
- …
- Hum… peut-être que vous connaissez le CEN STIMCO, alors ?
- …
- L’équipe du laboratoire universitaire LUSAGE ?
- Ah, je crois savoir, attendez… Allez voir là-bas.
- D’accord. Dans le bâtiment bleu ?
- Oui, c’est ça. C’est le bâtiment bleu !
Suivant les instructions de l’accueil, je me dirige donc vers le « bâtiment bleu ». Il faut sortir de la tour principale de l’hôpital par le rez-de-chaussée, emprunter le patio qui longe la cour intérieure avant de se retrouver face à une construction légèrement à l’écart, un bâtiment bleu. Une double porte vitrée donne accès à l’intérieur, c’est ouvert. En franchissant le seuil, je me retrouve dans ce qui ressemble à un grand open space avec plusieurs petits bureaux parsemés dans la pièce, certains sont en évidence, d’autres dans des alcôves séparées de cloisons mobiles et d’armoires de rangement. De petites salles jouxtent la grande. On aperçoit aussi quelques coins avec des fauteuils, des plantes, une petite cuisine. Une salle vitrée circulaire trône au milieu du bâtiment, l’intérieur ressemble à un salon avec des canapés, une table basse et une télévision. Il est assez tôt et les salariés ne sont pas encore arrivés. Je suis seul dans le Living Lab.
Cette entrée peu fracassante marque le début de mon enquête sur le terrain des Living Labs. Le premier contact avec la standardiste de l’hôpital m’avait instantanément mis la puce à l’oreille : le Living Lab ne semble guère connu au-delà de ses murs. Par ailleurs, en 2014, la notion de Living Lab (LL) était relativement confidentielle auprès du grand public. L’immersion sur ce terrain préliminaire répondait à un besoin qui est apparu rapidement après le démarrage de la thèse : investiguer les lieux, aller à la rencontre des acteurs, voir le Living Lab en action et observer directement sa réalité sensible.
Qu’est-ce qu’un Living Lab ?
La question est simple et redoutable à la fois… Cette interrogation ne cessera d’être réactivée et réactualisée durant toute la durée de la thèse. C’est aussi une question que l’on nous adressera directement quel que soit le milieu. Répondre à LA question dès l’introduction laisse peu de place au suspens de l’enquête. Néanmoins, il serait sans doute peu charitable de notre part de laisser le lecteur sans repère. Aussi, nous nous cantonnerons ici à présenter les principaux éléments qui composent la définition de Living Lab (LL) telle qu’elle est mobilisée par ses acteurs. L’un des objectifs de la thèse, en fil rouge de l’analyse, sera donc de confronter nos observations aux éléments de langage qui s’égrainent dans le discours des acteurs.
La notion de Living Lab (« laboratoire vivant ») est apparue au tournant des années 1990 aux États-Unis au sein des milieux académiques en science et ingénierie. Sa paternité a été attribuée à William J. Mitchell, chercheur en architecture et urbanisme au MIT (Massachusetts Institute of Technology). Initialement formulée comme une démarche de recherche, la notion a été l’objet de multiples définitions, construites par des chercheurs et des praticiens dans les LL. Aujourd’hui, ces définitions cohabitent, ce qui rend leur compréhension plus délicate, d’autant plus qu’elles sont flexibles et sujettes à l’interprétation et à l’appropriation.
En reprenant les traits saillants des principales définitions, on peut dire simplement qu’un LL est une organisation regroupant des acteurs issus de milieux diversifiés, notamment entre la recherche et le marché (chercheurs, industriels, décideurs publics, etc.), dans le but de co-concevoir des produits et/ou de services en accordant aux usagers une place plus « active » dans le processus. Les démarches méthodologiques sont qualifiées de « centrées-utilisateur » (user-centered) ou « portées par l’usager » (user-driven) pour en souligner les aspects collaboratifs. Ces structures sont également marquées par un fonctionnement itératif et une volonté de pratiquer une forme d’innovation ouverte (open innovation). Par ailleurs, les LL se révèlent largement tournés dans la production d’artefacts sociotechniques au point d’en devenir parfois des officines techno-push. Enfin, les LL se proposent d’expérimenter dans des conditions « les plus réalistes possible », c’est-à-dire soit en situation réelle, soit dans des environnements qui simulent ces conditions.
Pour le dire autrement, les Living Labs sont de petites structures dont la forme organisationnelle ressemble à celle d’une start-up et dont le fonctionnement est rythmé par des projets. Le nombre de ses salariés varie généralement entre 2 et 6. Un Living Lab est avant tout une méthodologie (dont nous venons d’énoncer les principes de base), mais cette démarche se matérialise souvent par un lieu (un espace de co-conception, une plateforme technique, des bureaux, etc.). Levons donc immédiatement l’ambiguïté : un Living Lab est l’assemblage des deux éléments, c’est une méthodologie et un lieu. Les caractéristiques varient beaucoup d’un LL à l’autre, que ce soit en termes de statut juridique, de source de financement, de méthodologie employée ou de nature de l’organisme à l’initiative de sa création.
Les Living Labs officient dans de nombreux domaines (énergie, art, médiation culturelle, smart city, nouvelles technologies, etc.). Notre enquête porte uniquement sur l’étude des Living Labs en Santé et Autonomie (LLSA). On en dénombre actuellement environ 35-40 sur le territoire français1. Ce domaine a la particularité d’être fortement structuré par des réseaux d’acteurs territoriaux et nationaux. Leur dynamisme tient à la montée en puissance de la « silver économie » (dont les produits se destinent aux « seniors ») et à l’appétence des politiques françaises et européennes pour l’innovation. Les LLSA visent la production d’innovations à destination d’un large public composé de personnes en perte d’autonomie, sujettes à des maladies chroniques, handicapées, etc. Leur cible ne se restreint pas aux « usagers » et va au-delà en ciblant également les professionnels de santé.
À quoi sert un Living Lab en Santé et Autonomie ?
Les LLSA se sont créés en réponse à un contexte de basculement démographique inédit. L’augmentation du nombre de personnes âgées et dépendantes attendue à l’horizon 2050 fait craindre aux acteurs du soin des carences dans la prise en charge tant les structures se révèlent actuellement inadaptées. Par ailleurs, ces trois dernières décennies ont été marquées par des évolutions importantes dans le champ sanitaire. Plusieurs modifications sont intervenues notamment concernant la place du patient et les représentations de l’activité médicale. Ces transformations participent de nouvelles manières d’envisager le développement des dispositifs de soin. Enfin, le mûrissement des technologies et les injonctions au travail (plus) collaboratif ont fait le lit du développement des LL.
Les LLSA s’inscrivent donc dans un contexte particulier et se perçoivent comme une tentative (innovante) de réponse à un problème sociétal. Malgré l’engouement de l’Union européenne qui voit en eux des « leviers de croissance », ils sont majoritairement nés en marge des institutions dominantes. À l’heure actuelle, aucun programme politique ne participe directement à leur éclosion et/ou à leur développement. C’est donc de manière éparse que les LLSA se sont développés sur le territoire, parfois dans le creuset des universités, parfois portés par des structures médicales, dans certains cas soutenus par des collectivités territoriales ou encore de manière plus marginale directement par des acteurs privés.
Les LLSA partent du constat que le fonctionnement des structures médicales et médico-sociales est caractérisé par un cloisonnement entre les spécialités et que cela nuit au développement de solutions pleinement utiles pour les usagers. Leur leitmotiv est donc de proposer une logique d’innovation plus transverse en conciliant l’intérêt des différentes « parties prenantes ». Ils souhaitent ainsi partir des « besoins réels »2 des usagers (des patients, par exemple) pour mettre en place un projet collaboratif avec des chercheurs, des entrepreneurs, des médecins, des décideurs publics (etc.), pour trouver la solution la plus adaptée. Le LLSA se constitue comme le garant du fonctionnement du projet, effectue un travail d’intermédiation et met en acte des méthodologies qui permettent une activité dite de co-conception et de codesign.
Comment fonctionne un LLSA ?
La définition des LLSA fait problème tant elle est constituée de mots-valises qui obstruent notre capacité à nous représenter réellement cet objet. En outre, la claire circonscription de leurs activités est parasitée par la présence de multiples autres types de « labs » qui peuplent le paysage des structures d’innovation. Les terminologies proches brouillent les cartes, par exemple avec les FabLabs. Bien qu’il soit enserré dans un réseau qui partage des ramifications avec ces organisations sœurs, le LL peut revendiquer une singularité qui se révèle être une véritable nouveauté. Se demander comment un Living Lab fonctionne est donc une invitation à ouvrir la boîte noire organisationnelle et à mener une enquête qui aille au-delà des discours promotionnels. Mais c’est aussi se confronter à une nuée d’organisations disparates et qui semblent a priori caractérisées par leurs différences.
Au début de la thèse, les travaux scientifiques étaient déjà assez fournis sur la notion de « Living Lab ». Malgré tout, et encore aujourd’hui, très peu d’études adopt(ai)ent un regard sociologique sur cet objet, ce qui nous confère une légitimité à nous en emparer pour proposer des éclairages complémentaires à ces travaux. Par ailleurs, les enquêtes existantes procèdent souvent selon des méthodologies quantitatives. Si elles demeurent sans doute pertinentes pour rendre compte de la diversité des types d’organisation et pour construire des enquêtes à large panel, elles se révèlent limitées pour établir une connaissance ancrée et fine du fonctionnement des LL.
Pour ces raisons, nous avons opté pour un protocole méthodologique accordant une grande importance au recueil de données empiriques de nature qualitative. Notre thèse repose ainsi sur un travail d’inspiration ethnographique multisitué, principalement effectué dans 3 LLSA français. Nos phases d’observation ont donné lieu à la réalisation de monographies descriptives. Le volet méthodologique est complété par une série d’entretiens semi-directifs (40) et par notre participation observante (Soulé, 2007) à un réseau transverse de LLSA.
Qu’observer dans un LLSA ?
Parmi les éléments de définition qui servent à caractériser les LL, un seul fait consensus : l’innovation. Les LLSA s’en réclament doublement : à la fois comme producteur et comme structure innovante dans leur fonctionnement. Cette unanimité constitue pour notre enquête un point d’ancrage idéal. Loin de nous mettre à la place d’un consultant chargé d’expertiser le degré de performance en innovation des LLSA, nous endossons les habits du sociologue. Ainsi, nous partons du principe qu’il y a, comme le dit G. Gaglio3, « présomption d’innovation » à propos de ces organisations, mais qu’il est nécessaire d’éclaircir ce buzzword et les réalités qu’il recèle. Pour ce faire, nous nous appuyons largement sur la sociologie de l’innovation pour analyser la structuration des LL et décrire l’activité des acteurs et de l’organisation. Plutôt que de se demander frontalement si ces nouvelles structures sont innovantes, nous questionnerons la place de l’innovation, son rôle et ses effets.
Le deuxième champ de la littérature que nous mobilisons est la sociologie des organisations. En faisant appel à elle, nous nous dotons d’un outillage théorique à même de rendre compte de la structuration des LLSA. Partant du principe qu’il est difficile de saisir au premier abord les frontières des LLSA en tant qu’institution, la sociologie des organisations nous a amené à circonscrire l’objet et à le solidifier pour mieux en rendre compte. Ces deux domaines de la littérature (innovation et organisation) sont pour nous totalement complémentaires.
Troisième notion et dernier champ capital de cette thèse : l’institution. Au gré de l’enquête, nous avons observé des LLSA particuliers à un niveau microsociologique, mais nous avons également assisté à une dynamique, plus globale, en émergence. Nous considérons que les LLSA ne sont pas des épiphénomènes, car leur naissance s’inscrit dans la lignée de certains courants et tendances antérieurs. Passés les notions-valise et les discours enjôleurs, on découvre une situation qui renferme de nombreuses volontés (ou velléités) de pérennisation. Mieux, nous pensons que les LLSA tentent de faire institution. C’est ce point central que nous allons défendre dans la thèse en apportant un contenu pour étayer notre affirmation et en analysant ce à quoi renvoie cette tentative. En effet, il s’agit pour ces organisations de s’inscrire dans la durée et en rupture avec plusieurs conventions dominantes du champ sanitaire. Les LLSA tentent ainsi de faire advenir un nouveau modèle. C’est là tout leur intérêt sociétal bien sûr, mais aussi en ce qui nous concerne sociologique.
Un processus analytique allant de l’organisation à l’institution va constituer le fil conducteur de la thèse. Notre problématique (voir en détail au chapitre nº2) s’articule autour de cette notion. Ainsi, nous proposons de montrer comment plusieurs LLSA investigués tentent de faire institution. Aux organisations individuelles s’ajoute un éclairage sur les dynamiques du réseau des LLSA qui se présente comme un support du faire institution. Cette réflexion nous amènera à questionner la place des usagers (qui est la véritable originalité du modèle LL), à nous intéresser au régime de production des innovations, à discuter du rôle de la technologie, à faire retour sur les conditions d’enracinement des LLSA sur leur territoire et à comprendre comment un modèle se met en réseau et se stabilise. D’un point de vue théorique, la thèse s’inspire grandement des préceptes méthodologiques du néo-institutionnalisme. Nous avons donc opté pour une étude multiscalaire. Pour être en mesure de décrire les interactions entre les différents types d’acteurs, notre étude explore plusieurs niveaux en soulignant à chaque fois comment fonctionnent les mécanismes du faire institution.
Pourquoi une thèse sur les LLSA ?
Considérant le peu de travaux dans la sphère de la sociologie, j’ai entrepris de me lancer dans une thèse où l’étude de l’objet est volontairement large. Il me semblait important de proposer, via ce travail, une enquête considérant les LLSA dans toute leur épaisseur. L’inspiration de l’ethnographie est la bienvenue dans ce genre d’entreprise dont l’ambition est d’exposer des environnements complexes. Cette optique me semble importante dans la mesure où cette thèse peut être perçue comme une amorce à de futures recherches.
La thèse est un exercice devant répondre à de nombreux critères académiques qui peuvent la faire paraître absconse et/ou ennuyeuse pour les profanes. Pourtant, elle a été pour nous l’occasion d’un engagement (mesuré) parmi des acteurs de terrain et nous espérons que la lecture de cette thèse leur sera utile. Nous ne la concevons pas comme un guide de « bonnes pratiques », comme un retour d’expérience ou comme une typologie des organisations. C’est pour nous davantage une mise en récit, un travail historique sur de jeunes organisations, un regard distancié sur des pratiques, des interactions et des discours, et au final une base possible pour accroître la réflexivité. La thèse a été réalisée d’abord dans le but de contribuer au champ scientifique de la sociologie de l’innovation, mais je l’ai écrite aussi pour qu’elle puisse servir aux praticiens du secteur des LLSA, éventuellement intéressés par un regard extérieur, et soucieux de mieux comprendre les phénomènes sociaux dont ils sont les acteurs4.
Annonce du plan
Cette thèse se compose de trois grandes parties et huit chapitres. Schématiquement, chaque partie correspond à un stade théorique de l’enquête. La première consiste en la construction de l’objet (chapitre n°1, 2 et 3). La seconde partie concerne la restitution des éléments empiriques par la voie des trois monographies de LLSA (chapitres n°4, 5 et 6). Enfin, la troisième partie est consacrée à l’analyse des résultats (chapitres n°7 et 8).
Le chapitre n°1 se présente comme la partie socio-historique de la thèse. Rendre compte des LLSA oblige à faire retour sur l’origine de la notion. À travers une large revue de la littérature (principalement composée de textes extérieurs au giron de la sociologie), nous montrons les évolutions de la notion. Depuis ses débuts dans les sphères académiques nord-américaines jusqu’aux structures publiques territorialisées françaises, nous retraçons la trajectoire d’une notion modelée par des programmes économico-politiques, des publications scientifiques et les retours d’expérience des praticiens. Le début du chapitre traite des LL de manière générique avant de spécifier le propos sur les structures dans le domaine de la santé et de l’autonomie. Ce retour historique est l’occasion d’ancrer les LL dans des contextes particuliers, par exemple celui des transformations du secteur sanitaire en France, et d’éclairer les tendances qui les ont façonnés. Le chapitre s’achève sur un état des lieux de la dynamique LLSA et une cartographie de ses principaux acteurs. Les éclairages apportés dans ce chapitre permettent de contextualiser un objet flou et de délimiter un périmètre pour l’enquête.
Le chapitre n°2 constitue le bloc théorique de cette thèse. Pour construire la problématique, nous nous sommes prêtés à un examen de la littérature sociologique autour de la question de l’institution. Le but recherché est la description des principaux courants, des enjeux et des difficultés théoriques à rendre compte de l’institution (et du processus d’institution). Ce descriptif non exhaustif nous sert également à affirmer notre positionnement théorique, notamment par rapport au courant néo-institutionnaliste, et à justifier l’articulation entre les différents courants de la sociologie qui sont mobilisés. Le chapitre n°2 donne à voir la construction de la problématique. À ce titre, nous explicitons les notions que nous comptons mobiliser, par exemple le faire institution. Enfin, trois hypothèses sont soulevées et développées. Chacune est à la fois le résultat de la recherche, une prise de position pour abonder dans le sens de la problématique et une piste à mettre empiriquement à l’épreuve.
Le chapitre n°3 explicite les fondements méthodologiques de l’enquête. Rendre compte d’un objet aussi flou que les LLSA a nécessité de penser un protocole spécifique pour lever les difficultés empêchant de l’embrasser. Nous décrivons donc la manière dont nous avons construit un travail de terrain. Le chapitre méthodologique est aussi l’occasion de questionnements d’ordre épistémologique. Par ailleurs, dans une veine plus réflexive, c’est l’engagement du chercheur et son positionnement sur le terrain qui font l’objet d’une discussion. L’objectif est de donner aux lecteurs l’ensemble des pistes pour comprendre comment l’enquête s’est déroulée, et éventuellement en réutiliser le protocole pour prolonger/compléter le travail d’investigation.
Les chapitres n°4, n°5 et n°6 sont les études de cas de cette thèse. Chacune est le portrait détaillé d’un Living Lab. À des fins de comparaison, les monographies sont articulées autour d’un plan similaire. Schématiquement, on retrouve un historique de la structure, un descriptif de l’environnement, les éléments du fonctionnement général, l’explicitation du cadre thématique (et théorique) et enfin plusieurs focalisations sur des projets qui sont illustratifs du fonctionnement de l’organisation. Les monographies sont agencées dans l’ordre chronologique du travail de terrain. Les trois portraits sont ceux d’Autonom’Lab (Limoges), du CEN STIMCO (Paris) et de PROMETEE (Nancy).
Le chapitre n°7 discute les résultats du travail empirique. Si l’on peut considérer que les monographies sont déjà des résultats de l’enquête, elles demeurent très descriptives. Ce chapitre construit donc une analyse plus élaborée en apportant les éclairages théoriques de la discipline. Le propos est construit en deux parties : la première moitié du chapitre traite du rôle particulier de l’usager dans les LLSA tandis que la seconde aborde l’inscription de ces structures dans un régime de promesses technoscientifiques. La place de la technologie est prégnante dans les LLSA et elle constitue avec l’implication des usagers une composante permettant la stabilisation organisationnelle. Ce chapitre répond aux deux premières hypothèses annoncées dans le chapitre théorique (n°2).
Le dernier chapitre (n°8) constitue en quelque sorte le point culminant de la thèse car il apporte des éléments de réponse majeurs à sa problématique, et également à la dernière hypothèse. Avant cela, la question de l’institutionnalisation est passée en revue, notamment en s’appuyant sur le rôle culturel de l’innovation. Pour ce faire, le plan accorde une grande importance aux niveaux d’analyse différenciés qui permettent de balayer plusieurs aspects des LLSA. Nous y décrivons comment les LLSA fonctionnent par une mise en réseau des entités et de quelles manières ils se construisent un positionnement singulier dans le domaine. Le chapitre se termine par la proposition scientifique du concept d’« institution-frontière » pour envisager une nouvelle manière d’étudier les organisations qui font institution.